« Je ne veux pas mourir. Je... je vous en prie... je ne veux pas mourir. » L'autre le regarda avec un air sombre, avant de serrer le poing et de le lui envoyer dans la mâchoire. La violence du coup fit tomber Edgar de sa chaise dans un gémissement. Malheureusement, lié comme il était par une épaisse corde, la chaise lui tomba dessus et il fut incapable de bouger pendant une minute au moins, sentant juste la douleur aller et venir en vagues destructrices. Il entendit des bruits de pas et, brutalement, se sentit tiré en arrière par la tignasse. Il aimait bien ses cheveux. Il avait des jolis cheveux, qui partaient dans tous les sens mais d'une manière organisée (enfin, c'était ce qu'il aimait penser). Il poussa un autre gémissement en papillonnant des yeux, jusqu'à capter le regard vert pailleté marron de l'autre.
« Il n'y a qu'une manière pour ne pas mourir, Eddie. » Personne ne l'avait jamais appelé Eddie. Si, peut-être sa sœur ou sa mère – mais c'était il y a des années. Eddie, ça fait trop... trop enfant. Edgar était un homme maintenant. Un homme au visage défiguré, au corps décharné et à la lippe sanguinolente.
« Je ne sais rien, je vous le jure... » L'autre le regard un long moment, le retenant toujours par les cheveux, avant de lui donner un coup de poing d'une violence inouïe. Il s'affaissa lourdement sur le sol, sentant la chaise l'accompagner dans son mouvement et lui briser (ou du moins était-ce l'impression qu'il en avait) les poignets.
Il ne voulait pas mourir. Il s'accrochait à la vie comme il ne s'était jamais accroché à rien. Il avait une vie à vivre, vraiment. Une femme à aimer. De l'amour à faire. Un avenir à découvrir. Un milliard de choses à faire. Il aurait bien fait une liste. 1) Avouer à --
« Tu ne tiendras pas une nuit de plus et tu le sais. C'est maintenant ou jamais, Eddie. » L'autre était revenu et l'avait détaché – enfin. Il n'eut même pas la force de se frictionner les poignets endoloris et resta juste là, espérant secrètement que le sol allait l'engloutir et le ramener à son pays natal d'Ecosse. Ah, qu'est-ce que sa petite maison de Roslin lui manquait, tout compte fait... Il se rappelait des grands murs au papier peint immonde, des meubles sentant constamment le clou de girofle orangé, les cris sans fin de sa sœur et du chien. Et tous les soirs, emmitouflés sous un plaid, à regarder en famille la télévision, dans un silence religieux. Et lorsque le père Carruthers revenait, le silence, le chien délaissé, la télévision sur les infos, l'ambiance étouffante. Même ça, ça lui manquait. Tout lui manquait. Il aurait donné plus cher que sa vie juste pour avoir le droit à une seconde de son ancienne vie, au Mi6 ou ailleurs.
Non. Surtout pour le Mi6 en fait. Pour le plaisir d'agacer tout le monde avec ses sourires trop grands, trop spontanés. Pour le plaisir d'aller voir les jeunes agents (au féminin) s'entraîner en pantalons de yoga trop serrés. Pour le plaisir de retourner à sa petite vie tranquille, coincé dans un appartement de Whitechapel, avec pour seules compagnies ses somnifères et ses chemises froissées. Putain. Il a pas envie de partir, de mourir.
« Je... je ne sais-- » Un coup de pied dans les côtes le fait cracher du sang et se convulser deux fois, la douleur revenant comme un raz-de-marrée pour le tourmenter, lui mettre la tête à l'envers et le laisser quasiment inconscient. Il se sent tiré mais se dit que, si il n'ouvre pas les yeux, alors rien de tout cela n'arrivera pour de vrai. Son crâne lui fait mal, il tire encore sur ses cheveux. Mais c'est une douleur mineure, comparée à celle qui vibre dans tout son être, comparée à celle de devoir quitter cette vie, maintenant, à jamais. Il entend le bruit d'une gâchette et cela semble le ramener à la conscience la plus extrême ; lorsqu'il écarquille les yeux, qu'il a dilatés et chocolat, il ne voit qu'un revolver pointé sur son front.
« On trouvera quelqu'un d'autre, Eddie. On trouvera quelqu'un d'autre. On tuera ta famille. Tes amis. On s'occupera même de ta petite protégée, ta petite Charlie. Un à un. Tu n'es que le premier, Eddie, et tout cela va arriver par faute. » Il réprime un sanglot en entendant le nom de Charlie. La pression se fait insistante sur son front.
« Je... non... je vous dirai tout... » lâcha-t-il à grande force de sanglots répétés qui entrecoupaient ses paroles. L'autre tira un peu plus sur ses cheveux pour lui faire remonter le menton et approcha son visage du sien, un sourire carnassier lui écartelant les lèvres.
« Répète un peu ? » « Je vous dirai tout mais... mais ne leur faites pas de mal. » +
POURQUOI ES-TU PLUTÔT AVEC LES MÉCHANTS ? si on avouait à des gens du Mi6 que Edgar était un agent-double pour le côté obscur, personne ne le croirait. Parce que vous voyez, Edgar est un homme gentil, pas très affectueux mais tendre, bienveillant au posible. Il n'est pas méchant. Lui-même ne se considère par méchant. Pourtant, il n'arrive pas à se regarder dans un miroir, il ne dort plus qu'avec des cauchemars. Il n'a jamais voulu ça, ni pour lui, ni pour personne. Son plus gros défaut, à Edgar, c'est qu'il ne veut pas mourir. Et cela l'a mené à faire des trucs horribles - notamment à être plutôt avec les méchants. Donc
pourquoi, la réponse est
pas le choix.
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DANS QUEL DOMAINE OPÈRES-TU ? il répond aux ordres qu'on veut bien lui donner. Il oublie parfois de donner ses vitamines à un agent. Il informe les méchants qui a un problème de hanche. Il soigne aussi les méchants qui sont amochés, le soir, l'après-midi, le matin, dès que son téléphone sonne. Il informe ses employeurs des allées et venues des agents. Il fait ce qu'on lui demande.
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POURQUOI ES-TU UN SI BON AGENT DOUBLE ? parce qu'il est insoupçonnable. Un peu trop bavard, un peu trop rigolo, pas assez mature il paraît. Il a l'air intègre, Edgar, et il a un poste plutôt important au Mi6. On aurait du mal à imaginer cet homme, qui sourie volontiers, qui parle d'aller à Disneyland pour le week-end et qui porte un t-shirt Star Wars tromper sa profession ou un quelconque contrat.
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ET QUELS SONT TES POINTS FAIBLES ? il est un très mauvais menteur. Vraiment. Il a une moue lorsqu'il ment, une voix spécifique. Et puis, il est très nul pour inventer des excuses et il est affolé dès qu'il reçoit des directives de ses employeurs officieux. Il agit parfois bizarrement, et ce n'est pas sans mettre la puce à l'oreille de certains de ses collègues.
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PLUTÔT MANIPULATEUR OU MACHIAVÉLIQUE ? aucun des deux, en fait. Mais sinon, en dernier recours, vraiment, genre le dernier de tous les trucs possibles, manipulateur (à petites doses).
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TON OBJET FÉTICHE ? une paire de Converses blanches un peu élimée et sale qu'il met quasiment tous les jours. Il les a depuis quelques années maintenant et les fait régulièrement réparer. Il ne s'en séparerait pour rien au monde - il s'est d'ailleurs séparé avec une femme parce qu'elle voulait les jeter à la poubelle.
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PARLE MOI DE TES PENCHANTS AMOUREUX ET DE TA SITUATION ACTUELLE ? hétérosexuel, même s'il n'a aucun a priori sur l'autre tendance. Et la situation actuelle... eh bien, c'est un peu compliqué. Même s'il ne le dira jamais de vive voix, oui, Edgar est complètement amoureux d'une jeune femme. Mais vous voyez, le problème majeur, c'est que c'est une
jeune femme. Et qu'elle a tout le Mi6 à ses pieds donc bon, il fait un peu tâche. C'est un peu compliqué - surtout que après une année de silence radio, il n'a pas réussi à l'oublier.
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ET TON PIRE CAUCHEMAR ? que la
jeune femme découvre qu'il est un agent-double, bon dieu, ce serait tout à fait horrible. Ou bien que quiconque le sache. En fait, il vit un cauchemar, il voit mal comment ça pourrait empirer.
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QUE DIRE DU NOM QUE TU UTILISES POUR TES ESPIONNAGES ? même si ses employeurs ont la sale habitude de l'appeler
Eddie, lui préfère
Twist comme Oliver Twist, comme le mot twisted, comme la danse. eci dit, il ne l'utilise jamais vraiment, ce pseudo idiot.
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QUEL A ÉTÉ TON ESPIONNAGE LE PLUS RÉUSSI ? il n'y en a pas vraiment eu. Il refuse de penser à tout cela comme des réussites.
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ET TA PLUS GROSSE DÉFAITE ? eh bien, celle de s'être retrouvé dans cette situation très certainement.
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TA PIRE ADDICTION ? les somnifères. Il en prend depuis qu'il a seize ans et ne s'est jamais arrêté depuis. Il en prend un peu plus ses derniers temps et ils commencent à ne plus faire effet, à son plus grand déplaisir.