bang bang he shot me down.
- à 17 ans-
« Elli, je... je suis enceinte. » C'est à ce moment précis que la vie du jeune homme de dix-sept ans bascula. Il n'avait que dix-sept ans et il allait être père. C'était impensable. Pour lui, la Terre avait cessé de tourner, le temps s'était arrêté et l'oxygène lui devint une chose étrangère. Comment est-ce qu'un jeune couple, un couple de gamins, pourrait s'occuper d'un enfant? Ils n'avaient pas fini leurs études et leurs boulots étaient vraiment (pardonnez l'expression) merdiques, c'était des jobs d'étudiants. « Elli... Elliot, par pitié, dis quelque chose! J't'en supplie, réagie au moins, merde! » Sally, sa copine était en larme depuis son arrivée. Plus tôt dans la soirée, il venait de se lever de table quand il entendit cogner chez lui; c'était elle. Elle pleurait, son mascara et visage ruinés par les larmes, ainsi qu'elle avait avec elle un sac sur le dos et un autre à ses pieds. Elle s'était jetée dans les bras de son copain et à travers ses sanglots, elle réussit à lui dire que ses parents venaient de la mettre à la rue. Ils étaient allé se réfugier dans la chambre du garçon suite à une conversation avec les parents d'Elliot, qui sans hésitation, permirent à la jeune fille de vivre chez eux et c'est à l'instant où les deux adolescents étaient enfin assis qu'elle lui dévoila pourquoi ses parents l'avaient rejeté. Le jeune homme ne comprenait juste pas. « Mais... mais les protections? » « Il faut croire que nous sommes tombés dans le 1% du risque. Il ne savait pas quoi dire. À l'école, on apprend la littérature, les mathématiques, les sciences, l'histoire... mais pas ÇA. « Est-ce que tu as pensé à- » « Oui et il est hors de question. Mes parents pensent déjà que je suis une imbécile imprudente, je n'ai pas besoin qu'ils pensent que... que je suis ce genre de fille, tu vois ce que je veux dire? » Oui, il comprenait, mais si ses parents l'avaient renié parce qu'elle était enceinte, alors pourquoi ne pas faire à sa tête puisque décidément, ils n'aimaient pas leur fille. Mais elle avait pris sa décision et il allait la respecter. Plusieurs garçon de son âge auraient décidé de laisser Sally seule, ils se sauraient sauvés de la situation. Elliot peut bien être des choses, mais certainement pas un lâche. Et puis, pour lui, Sally était la personne la plus précieuse à ses yeux. Il l'aimait réellement et il était prêt à tout pour elle. Le soir même, les deux adolescents annoncèrent la nouvelle au reste de la famille Kingston et tout se déroula mieux qu'ils l'avaient espérés. Ce n'était pas l'argent et l'espace de la maison qui pouvait poser problème à la famille.

Neuf mois plus tard, Elliot étaient officiellement père de deux enfants; hé oui, le couple a eu des jumeaux. Un petit garçon du nom de Jude et une petite fille prénommée Hailee. Certain pourrait croire que c'était une malédiction qui lui était tombé dessus. Pourtant, c'était un pur bonheur. Dans sa malchance, il avait trouvé la joie. Et c'est aussi dans la salle d'accouchement qu'il savait maintenant ce qu'il voulait faire dans l'avenir. Il voulait que ses enfants puissent grandir dans un monde de paix et sans danger. Il aurait pu rentrer dans l'armée, mais il détestait la guerre. Il aurait pu rentrer à l'école de police, mais cela ne semblait pas assez. Non, il allait devenir un espion, un agent secret.

bang bang i hit the ground.
- à 20 ans -
C'est après trois ans d'études et d'entraînement qu'il rentra dans la Military Intelligence Section 6 ou mieux connu sous le nom de MI6. Il avait été accepté sans trop de difficulté, Elliot ayant toujours été doué autant au niveau intellectuel que physique (bien qu'il n'en a pas l'air). Pendant ses années d'études, il a rencontré un autre aspirant espion du nom de Charles Wyatts qui fût rapidement son ami. Mais c'est seulement quelques mois après leur rencontre qu'ils devinrent très proche, voire des meilleurs amis.

Très vite, il sut que ses supérieurs avaient un intérêt envers lui: du moins, dans les salles de tirs. Malgré son manque d'expérience, il était vachement doué avec tout ce qui semblait de loin ou de proche à un fusil. Le jeune n'y portait cependant peu d'attention. Pour lui, son talent pour viser était naturel, mais il n'y voyait pas l'intérêt. C'est plus tard qu'il apprit à quel point ce talent lui était un avantage et que cela lui permettrait d'avoir une bonne renommée. Mais pour l'instant, il se disait qu'il n'était qu'un petit nouveau qui allait échelonner vers le haut tout au long de sa carrière comme la plus part des agents. Et pendant qu'il se disait ceci, des regards curieux et parfois jaloux l'observaient, admettant son potentiel.

bang bang...
- à 26 ans -
C'était un jeudi avant-midi quand la secrétaire principale de M. lui avait demandé de se rendre au plus vite possible au bureau de sa supérieure. « Sûrement veut-elle le rapport plus tôt que prévu?» pensa l'agent 047. Heureusement, bien que préoccupé par sa famille, Elliot est une personne très travaillante qui prend de l'avance sur tout quand il le peut et son rapport était déjà prêt, rien n'y manquait sauf peut-être la signature de M. L'espion arriva calmement au bureau de sa patronne et attendit dans la pièce, près des chaises d'invités. Sa supérieure avait le dos tourné vers lui, elle regardait par la fenêtre et semblait pensive. Elliot, n'osa pas lui poser de questions; il savait que M. n'aime pas qu'on lui parle avant qu'elle-même ne soit la première à prendre la parole. La femme d'expérience jeta un bref regard dans le reflet de la vitre et se retourna vers Kingston. « Agent 047, veuillez vous asseoir. » dit-elle avec fermeté. Ne rouspétant jamais les ordres qui lui sont donnés, Elliot s'assis. « J'ai le rapport de ma dernière mission, si c'est ce que vous voulez. » répondit-il presque automatiquement. « Je n'en doute pas, mais ce n'est pas de cela dont je veux vous parler. Vous êtes au courant de l'agent 004, n'est-ce pas? » Comment ne pouvait-il pas en être au courant? Cet agent double zéros s'était fait assassiné de façon horrible dans sa dernière mission qui remontait à près de deux mois de cela. « Oui, je suis au courant de sa mort. » « Bien. Je veux donc vous voir au test pour l'obtention de son poste cet après-midi à 13h00 exactement. » Elliot cligna des yeux deux fois et essaya de comprendre ce qui venait de se produire. On voulait de lui comme agent double zéro? « Je... pardon, je ne pense pas-...» Le visage de M. se durcit rapidement. Il espéra de ne pas l'avoir vexé. « Agent 047, je vais être franche: vous avez trop peu d'estime de vous, alors que vous êtes un modèle à suivre. Vous faites exactement ce que l'on vous demande et vous avez un talent particulier en matière de tir. Ne faites pas le sot et préparez-vous pour cette après-midi. Vous pouvez disposer et n'oubliez pas de remettre votre rapport à ma secrétaire. » « Oui, madame. » Il se leva et fit ce qui lui avait été ordonné et à l'heure prévue, il passa le test.

C'est seulement le lendemain matin qu'il reçut le verdict. Il arriva à son bureau et trouva une enveloppe vierge au centre de son espace de travail. Il l'ouvrit et lu ce qui y était écrit:

" Agent Kingston,
Félicitation, vous répondez à présent au code 004.
Venez me voir le plus vite possible, j'ai à vous informer de votre prochaine mission.
M. "

...that aweful sound.
- à 30 ans -
Et voilà. C'était fait. Il venait de signer les papiers de divorces. Une amertume venait à lui en regardant ces papiers, il sentait sa gorge se resserrer, il avait une pression à la mâchoire... bref, il était malheureux, triste. Désespéré aussi, en quelque sorte. Pendant des années, il s'était dit que s’il devait divorcer, la raison de ceci serait son travail. Mais non, loin de là. Il y a quelque mois de cela, Sally lui avait annoncé qu'elle ne ressentait plus rien pour lui et elle ne savait pas pourquoi. L'amour n'était juste plus présent. Enfaite, seulement de son côté, parce qu'Elliot l'aimait toujours autant après toutes ces années. Il mentirait s'il disait que cette annonce ne lui avait pas fait mal. Parce que ça avait fait affreusement mal. Si mal, il n'arrivait plus à la regarder dans les yeux, il osait à peine à lui parler. Depuis, il dormait sur le sofa. À 13 ans, les enfants étaient assez vieux pour savoir ce qui se passait. La seule chose qu'ils ne comprenaient pas, c'est que jamais leurs parents se sont mis à se disputer. Chacun pleurait dans son coin. Ils allaient à des rencontres avec un spécialiste (la sorte de spécialiste était évidente), mais cela ne semblait pas fonctionner. Ça a pris un moment avant que les adultes de la maison dévoilent l'avenir de la famille: ils allaient se séparer (le motif avait été épargné difficilement), les enfants allaient devoir rester chez leur mère puisque leur père était souvent absent, mais ils pouvaient le visiter sans problème et sans restriction.
Elliot déposa le stylo sur le bureau du notaire et avant que son ex-femme puisse lui dire un seul mot, il était parti. Ce soir-là, il était allé se saouler la gueule aux côtés de son ami Charles.

bang bang...
- à 36 ans -
C'est après 16 ans de carrière comme agent au MI6 qu'il apprit la vraie définition du terme « sacrifice ». Faire des sacrifices, ça ne voulait plus dire donner énormément de temps à son boulot. Ça ne voulait plus dire se blesser parfois gravement. Ça ne voulait plus dire qu'il lui était presqu'impossible d'avoir de relation stable amoureuse. Ça voulait dire tout autre chose, à présent. Ça voulait dire faire l'impossible. Comme tuer son meilleur ami, par exemple. Plus jamais il ne regardera son travail de la même manière après cela. C'est depuis ce temps-là aussi qu'il commença à revivre encore et encore cet horrible moment durant ses heures de sommeil. La peur de Charles, ses paroles, ses promesses « Tout va bien aller, Elli. Je te jure que si je meurs, je ne t'en voudrais pas. Tire, Elli! Par pitié, il faut que ça cesse! ». Il y avait aussi le sourire de ce salop de Plague. Ainsi que l'hésitation de la voix de M. qui résonnait de son oreille droite. « Tirez. Agent Kingston, tirez! » Pour finir il y a toujours ce bruit effroyable de coup de fusil qui le réveille en sursaut.
Mais c'était ça, travailler au MI6: encore et toujours des sacrifices.

...my baby...
- à 40 ans -
Un fusil était déposé sur le bureau le plus imposant du MI6, juste à côté du plus affreux des bibelots. M. continua à remplir son document et commanda: « Reprenez cette arme. » « Non. » À cette réponse, la redoutable femme leva les yeux et vu devant elle l'agent 004, plus sérieux que jamais. C'était à ne pas y croire; l'agent Kingston venait de la désobéir, lui, le seul espion qui au plus grand jamais avait mis en doute ses décisions et ordres. Si elle ne semblait pas perturbée par ce qui venait de se passé, elle l'était belle et bien sous sa couverture d'être infroissable. « Reprenez votre arme, c'est un ordre. » « Non. » Alors là, ça allait trop loin de son esprit pour la moindre compréhension. « Mais pour l'amour du ciel, qu'est-ce que cela signifie? » Inchangeable dans sa neutralité, Elliot rétorqua. « Ça veut dire que je quitte. » Pendant une bonne longue minute, aucun des deux ne parlèrent. Ils se regardaient dans les yeux avec un silence complet. « Vous ne pouvez quitter, agent 004. Je crois avoir été assez claire durant toutes ces années. » « Et si je disais que j'étais une exception à la règle? » « Alors je penserais que vous êtes fou. » Elliot sentit rapidement la colère qui sommeillait en lui depuis longtemps s'ébouillanter. S'en était assez, il avait pris sa décision. « Écoutez, j'ai dit que je quitte. C'est une affirmation et je tiens à ce que vous respectez mon choix. » Le ton de l'espion s'était élevé ce qui incita celui de sa supérieure à faire de même. « Écoutez-moi bien, Kingston. Vous êtes un membre très important de cette équipe et vous êtes toujours apte à travailler, il est donc hors de question pour vous de prendre votre retraite! Vous allez prendre une semaine de congé et réfléchir intelligemment à ce qui ce passe dans votre tête. Dans sept jours, vous reviendrez dans mon bureau et nous reparlerons de tout cela. » Et c'est ce qui se produit. Pendant sept jours il resta chez lui à réfléchir. Quand il revint au bureau de M., la rencontre fut longue, mais concluante: il n'était plus l'agent 004. Cependant, Elliot n'avait pas gagné la guerre. Loin de là. Il resterait à travailler au MI6. Il deviendrait un membre du personnel. Un membre du personnel avec une fonction floue et des tâches bien particulières. Le bureau le surnomma K. puisque que c'est plus rapide que de dire son nom ou agent 400 pour l'ironie. Il testerait les nouveaux gadgets et remplirait des rapports. Mais M. n'allait se débarrasser d'un des trois meilleurs tireurs de toute l'histoire de la MI6. Non, à quelques occasions, il entraînera les nouvelles recrues pour leur apprendre à tirer comme des pros. Elle avait d'autre projet pour lui, mais ça sera pour plus tard. Elliot n'avait, tout compte fait, que la satisfaction de pouvoir s'éloigner au moins un minimum d'une vie qui le hantait. À peine, mais c'était déjà ça.


...shot me down.
- à 41 ans (de nos jours) -
Il est possible de le croiser dans les bureaux de la Military Intelligence Section 6 presque tous les jours. Évidemment, puisque le terrain n'est plus son milieu de travail. Il est possible de le voir dans la salle de tir, pour essayer de nouveaux produits, pour enseigner comment tenir son arme aux petits nouveaux ou encore simplement pour se défouler. Il est aussi probable de passer à côté de lui dans le cadre de la porte du bureau de M. Enfin, c'est définitif que vous le verrez assis sur sa chaise à remplir ce qui semble le trentième rapport de la journée. Si vous lui adresser la parole, il restera toujours gentil et courtois, bien que très sérieux et professionnel. Toujours serviable, mais détaché. Si vous l'embêter... vous a-t-on déjà dit qu'il était un merveilleux tireur?